Moins de viande et plus de fruits pour la Martre aussi
Publié par Bourgogne-Franche-Comté Nature, le 28 février 2025
Le mustélidé forestier intègre bien des ingrédients à son menu.
Qu’est-ce qui vous a conduit à étudier le régime alimentaire de la Martre des pins ?
Depuis 45 ans, La Choue* effectue le suivi de 300 nichoirs à Chouette hulotte sur 11 forêts bourguignonnes, visités chaque hiver et printemps. Il s’avère que la Martre laisse fréquemment des traces de son passage, notamment des crottes sur le couvercle, ou des proies ou restes de proies à l’intérieur. Ce sont environ 10 % des nichoirs qui sont fréquentés par la Martre. Nous avons analysé ces données afin de mieux appréhender le régime somme toute peu connu du mustélidé, particulièrement en Bourgogne.
De quoi se nourrit la Martre ?
C’est certes une espèce carnivore, mais aussi frugivore. Son régime varie en fonction des saisons. Durant le printemps et l’été, elle consomme de gros insectes, en particulier des carabes des bois, et beaucoup de fruits et de baies, comme les sorbes, les cynorrhodons, les cornouilles, les pommes sauvages, les raisins, les prunelles… L’hiver, elle se reporte essentiellement sur de petits mammifères, comme les mulots et les campagnols, sur des oiseaux, sur des cadavres d’animaux parfois de grandes tailles, tels que les sangliers… Elle mange aussi une quantité surprenante de vers de terre. Ce régime omnivore lui permet de subvenir à ses besoins sans discontinuité, ce qui contribue à ne pas créer de fluctuation dans ses populations. Celles-ci demeurent stables sur les secteurs où sont installés nos nichoirs.
Des actions sont-elles entreprises vis-à-vis de la prédation sur la Hulotte ?
Nous installons de plus en plus de systèmes anti-prédation, qui se montrent assez efficaces. Nous avons effectué des comparaisons entre des forêts où les nichoirs étaient à 100 % équipés, d’autres partiellement, et d’autres pas du tout, comme dans la forêt domaniale de Châtillon-sur-Seine. Nous avons constaté que le taux de reproduction de la Chouette hulotte y était 15 à 20 % inférieur aux autres forêts. La Martre est cependant très intelligente et parvient quelquefois à contourner les obstacles. Nous avons par exemple découvert une patte de chevreuil dans un nichoir équipé ! Pour autant, la Martre ne représente pas la menace principale de la Hulotte. Elle s’intéresse d’ailleurs plutôt aux passereaux. S’il y a un visiteur bon grimpeur qui est fort à craindre pour les nichoirs de Hulotte, c’est le Raton laveur, une espèce exotique envahissante qui fait son apparition sur la région.
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Hugues BAUDVIN, Naturaliste à La Choue
Au regard de ce que consomme la Martre, on ne comprend vraiment pas qu’elle soit classée ESOD, « espèce susceptible d’occasionner des dégâts », anciennement « nuisible », dans certains départements comme la Saône-et-Loire et la Nièvre. Bien que le statut d’ESOD soit globalement contestable, on peut se figurer pourquoi sa cousine la Fouine apparaît dans la liste, car elle fait occasionnellement son marché dans des poulaillers. Si elle lui ressemble en apparence et qu’on les confond souvent, la Martre est strictement forestière, elle ne s’aventure pas dans nos élevages. Nous n’avons trouvé que deux restes de poules dans les fèces étudiées, et encore, il n’est pas certain que les volatiles aient été prélevés vivants.