Déchiffrer l’insaisissable lynx à l’aide de la photo-identification

Publié par Bourgogne-Franche-Comté Nature, le 3 janvier 2025   25

Une lecture attentive des tâches capturées à la sauvette par des pièges photographiques permet d’identifier le félin individu par individu.

Pourquoi photo-identifier le Lynx ?

L’espèce est discrète et son territoire est vaste. Il reste beaucoup à découvrir la concernant ! Reconnaître des individus photographiés représente donc une précieuse source d’information. Cela permet de connaître les secteurs fréquentés, le devenir d’une portée, le sort d’un animal blessé… Le Lynx se prête à la photo-identification, car chaque animal possède un pelage unique, plus ou moins ponctué de noir, soit en « spots », avec des taches noires nettes, soit en « ocelles », avec des nuages flous. La combinaison de la forme et de la disposition des taches est différente pour chacun, tel un véritable « code-barre ».

D'où proviennent les photos ?

Les auteurs sont des correspondants formés par le Réseau Loup-Lynx, des agents de l’Office français de la biodiversité ou des particuliers. Les photos sont pour la plupart issues de pièges photo/vidéo, des appareils camouflés qui se déclenchent automatiquement. Le terme « piège » n’implique pas pour autant une capture. Certaines personnes ont aussi la chance de faire une magnifique rencontre, par exemple dans un jardin ou en voiture, et en font une vidéo. Nous recevons principalement des données de la Bourgogne-Franche-Comté, mais aussi de la Savoie, de la Haute-Savoie, de l’Ain, de l’Isère et du Grand Est. La quantité annuelle de données a augmenté : transmettre est davantage devenu un réflexe. Nous veillons d’ailleurs à faire un retour à chaque contributeur, ce qui fidélise. En 2017, notre réseau a reçu 1 200 données, contre plus de 2 500 l’an dernier !

Comment identifier un individu ?

Je recours à un logiciel d’aide à l’identification. Je positionne d’abord informatiquement des points sur la photo pour délimiter la silhouette de l’animal : au niveau des épaules, des hanches, de la queue… Le logiciel en déduit la surface à examiner. Il analyse les positions des taches les unes par rapport aux autres et leur intensité. Il compare les métriques à celles déjà entrées dans notre base de données. Il en ressort un score de similarité avec un ou plusieurs individus de la base. Je procède ensuite à une vérification à l’œil pour déterminer si l’un des individus proposés correspond. J’enregistre l’événement dans l’historique de l’individu en renseignant la date, le lieu et l’heure de la prise de vue. En cas de non-concordance, un code temporaire est attribué dans l’attente d’autres images qui amèneront peut-être à conclure à la découverte d’un nouvel individu.

Sophie CHAPPA, Chargée de photo-identification du Réseau Loup-Lynx à l’Office français de la biodiversité de Bourgogne-Franche-Comté

Les photos demandent à être recadrées et ne montrent pas toujours un animal en son entier. Le lynx est parfois caché derrière de la végétation et il faut alors procéder à un méticuleux travail pour le distinguer et détourer une patte, un flanc… Cela nécessite de bons yeux. Une photo me prend une dizaine de minutes environ. Avant de soumettre la photo au logiciel, je regarde chaque photo à l’œil, car je reconnais bien certains individus à leurs particularités. L’espèce m’est devenue très familière. Je n’ai pourtant jamais vu de lynx en vrai ! Nous invitons toutes les personnes qui auraient des images de lynx ou des témoignages à les envoyer à l’Office français de la biodiversité de Bourgogne-Franche-Comté via l’adresse mail suivante : loup-lynx.bfc@ofb.gouv.fr. Même s’il est plus probable de faire une observation dans le massif du Jura, de belles surprises sont partout possibles, par exemple en Saône-et-Loire…