Les fabuleuses aventures de James-Webb et de Gaia
Publié par Journal en direct, le 10 octobre 2022 660
Le 11 juillet, le président américain Joe Biden dévoilait la première image prise par le télescope spatial James-Webb. À peine un mois plus tôt, le 13 juin, un communiqué plus discret de l’Agence spatiale européenne (ESA) annonçait la publication du premier catalogue complet de la mission Gaia, concernant la Voie lactée. Ces instruments bien différents, et néanmoins complémentaires, confirment de façon spectaculaire l’intérêt de mener des observations depuis l’espace. James-Webb et Gaia sont tous deux à l’origine d’avancées majeures, dont l’astronomie devrait bénéficier pendant des décennies.
Depuis sa mise en orbite fin 2013, Gaia passe le ciel au crible de façon systématique et recense tous les objets célestes placés dans sa ligne de mire, des objets dont elle étudie la distance, la position, le mouvement et la composition chimique. Le premier catalogue complet issu de la mission met aujourd’hui ces données à la disposition de l’ensemble de la communauté scientifique, sous la forme d’une carte en trois dimensions qui représente environ 1 % de la Voie lactée. Un petit chiffre qui masque une réalité impressionnante : l’inventaire de 1,8 milliard d’étoiles, de 500 000 astéroïdes, et de millions d’autres corps célestes, dont l’existence était pour certains jusque-là prédite par les modèles mathématiques mais non attestée par les observations, voire insoupçonnée. Les investigations de Gaia s’étendent même au-delà des limites de la Voie lactée, avec entre autres résultats la détection d’un million de galaxies et de six millions de « candidats » quasars, des noyaux de galaxies très actifs, situés à des milliards d'années-lumière de la Terre, dont la nature demande ici à être confirmée par des données complémentaires.
Astrophysicienne à l’Observatoire de Besançon, Annie Robin est l’une des spécialistes impliqués dans la mission Gaia. « Ce catalogue est le plus complet jamais réalisé sur la Voie lactée, et s’enrichit au fur et à mesure de l’analyse des données. Il devient le système de référence spatial pour tous les observatoires et les télescopes du monde. » Comme James-Webb, lui qui a pour vocation de cibler de petites zones ou certains objets de manière précise : si Gaia scanne le ciel, James-Webb, lui, l’approche en mode zoom. Il est équipé d’un miroir de 6,5 m de diamètre, contre 2,4 m pour son prédécesseur Hubble, et est à même de capter la lumière infrarouge émise par des objets extrêmement lointains. « C’est un instrument extraordinaire, imbattable en termes de précision et de profondeur de champ. » Les performances de James-Webb sont avérées jusqu’à des distances de 13 milliards d’années-lumière, un voyage dans l’espace et dans le temps propulsant les observateurs quasiment aux origines de la formation de l’univers…
Chacun sur son orbite, Gaia, la sonde européenne, et James-Webb, le télescope américain métissé de technologies canadienne et européenne, poursuivent leurs aventures en parallèle. À n’en pas douter, l’un comme l’autre jalonneront les prochaines années de connaissances et de découvertes passionnantes pour l’astronomie.