Les coléoptères aquatiques une armada de cuirassés hétéroclites

Publié par Bourgogne-Franche-Comté Nature, le 18 octobre 2022   3k

Éclipsés par la renommée des coccinelles, stars de leur ordre, et par les autres habitants des mares, peut-être plus photogéniques, les coléoptères aquatiques méritent pourtant d’être mieux connus.

Qu’est-ce qu’un coléoptère aquatique ?

Un coléoptère est un insecte doté d’une paire d’ailes cuirassées, les élytres, qui protège une seconde paire d’ailes servant au vol. À ce jour, c’est l’ordre des coléoptères qui rassemble la plus grande variété d’insectes. Ces espèces dont les larves sont aquatiques ont été rangées dans un même groupe fonctionnel. Il ne s’agit cependant pas d’une classification scientifique. On dénombre environ 660 espèces de coléoptères aquatiques en France, dont la taille peut aller de quelques millimètres à plusieurs centimètres. 2 bénéficient d’un statut de protection : le Grand dytique, coléoptère des lacs du gabarit d’une petite grenouille, disparu du territoire après la révolution industrielle. Et le Graphodère à deux lignes, encore indétecté en Bourgogne, récemment redécouvert en Franche-Comté.

Comment sont-ils équipés pour évoluer dans l’eau ?

Certaines espèces sont bien profilées pour la nage, en particulier les prédatrices, comme les dytiques dont le corps en balle de fusil et les pattes transformées en palmes leur permettent d’avancer rapidement. Les gyrins, qui nagent à la surface, possèdent quant à eux une paire d’yeux pour voir à l’extérieur et une autre pour voir sous l’eau.

D’autres espèces, qui se nourrissent de végétaux, paraissent plus pataudes. Certaines marchent sur le fond. Contrairement aux larves, les adultes ne sont pas capables de respirer sous l’eau. Ils doivent donc régulièrement remonter à la surface. Certains capturent de l’air avec leur arrière-train ou leurs antennes afin de créer une bulle d’air faisant office de scaphandre.

Quelle est l’état des connaissances sur ce groupe dans la région ?

 Les entomologistes* multiplient actuellement les prospections afin de disposer d’une liste plus complète des espèces présentes et de savoir quelles sont leur abondance et leur répartition géographique. L’enjeu ne se résume pas à traquer l’espèce rare : les coléoptères représentent une porte d’entrée pour l’étude des milieux aquatiques dans leur globalité. Ils sont un bon indicateur de l’état d’une mare et peuvent orienter vers des actions de gestion. De plus, leur survie est remise en cause par le changement climatique. Grâce à leurs ailes, ils sont certes capables de quitter un point d’eau pollué ou dépourvu de ressources alimentaires, mais encore faut-il en trouver un autre. Certaines espèces spécialisées, par exemple liées aux tourbières, sont ainsi particulièrement menacées.


Le mot de l'expert

Mathurin CARNET, Entomologiste* à la Société d’histoire naturelle d’Autun

Les coléoptères aquatiques sont-ils facilement identifiables ?

L’examen des faces à la fois ventrale et dorsale est souvent incontournable, ce qui implique quoi qu’il en soit une capture. La détermination de certaines espèces nécessite une dissection, mais une simple observation des ornementations suffit parfois. Parmi les espèces les plus aisément reconnaissables, on peut citer l’Hydrophile brun (le plus grand, tout noir), le Dytique marginé (bordé de jaune) et le Dytique d’Hermann (seule espèce du genre Hygrobia en France, il se nourrit exclusivement de vers de vase et émet un bruit lorsqu’on le prend entre les doigts). Chacun peut contribuer à leur recherche, à toute époque de l’année. Il suffit de photographier les 2 faces avant de relâcher les individus attrapés.


Mini-glossaire

Entomologiste : spécialiste des insectes.

Pour en savoir plus

Feuilletez le n° 30 de la revue BFC NATURE qui dédie un article aux coléoptères aquatiques. Consultez aussi la page https://observatoire.shna-ofab.fr/fr/enquete-sur-les-dytiques-et-les-gros-coleopteres-aquatiques_793.html du site de la SHNA-OFAB, vous y trouverez toutes les informations pour enquêter vous aussi sur les coléoptères aquatiques, avec protocole et clé d’identification.


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Crédit illustration © Daniel ALEXANDRE