Chacune des cellules de l’organisme humain compte 25 000 gènes, et l’information génétique est la même pour toutes. Ce sont des protéines, plus précisément des enzymes, qui rendent ou non les gènes actifs, donnant à chaque cellule une spécificité et un rôle particuliers. L’épigénétique est une jeune science qui étudie ces processus capables de modifier l’expression des gènes sans changer la séquence ADN.

Photo Gerd Altmann - Pixabay

Elle est le domaine de recherche d’Éric Hervouet et de Paul Peixoto, tous deux enseignants-chercheurs en biologie moléculaire à l’uFC / laboratoire RIGHT, dont l’ambition est de mettre leur discipline au profit de stratégies thérapeutiques contre le cancer. « Nos travaux ciblent notamment la formation des métastases. D’une tumeur primaire qu’elle a contribué à former, une cellule cancéreuse se détache pour s’implanter ailleurs. Elle perd alors ses caractéristiques d’adhérence et adopte de nouvelles propriétés, qui lui permettront de migrer dans l’organisme par le biais de la circulation du sang ou de la lymphe. Cette cellule retrouve ensuite ses capacités d’adhérence pour se fixer sur un nouveau tissu, où elle produit alors des métastases. Notre objectif est d’identifier les enzymes à l’origine des changements successifs de propriétés de la cellule cancéreuse, et de comprendre leurs modalités d’action. » Une enzyme ne travaille pas seule, mais avec d’autres protéines : les chercheurs formulent l’hypo­thèse que ce sont ces « protéines partenaires » qui permettent, ou non, à l’enzyme d’atteindre le gène et de le modifier.

Grâce aux équipements très pointus de la plateforme EPIGENExp et d’autres laboratoires en France ou à l’étranger, avec lesquels s’est constitué un réseau de collaboration, les enzymes ont pu être isolées et analysées, et leurs protéines partenaires identifiées. Ces résultats, obtenus grâce à la combinaison d’expérimentations biologiques, de calculs mathématiques et de statistiques, ont validé le postulat de départ des chercheurs. Désormais centrées sur les mécanismes à l’œuvre, les investigations se poursuivent avec le soutien de la Ligue contre le cancer, qui a récemment accordé à l’équipe un financement de 30 000 €.

Dans la droite ligne de ces recherches fondamentales qui constituent leur « cœur de métier », Éric Hervouet et Paul Peixoto travaillent à l’identification de nouveaux biomarqueurs tumoraux dans le sang avec le médecin biologiste Zohair Selmani (uFC / CHU de Besançon), qui a rejoint la plateforme. Cette recherche prometteuse fait actuellement l’objet d’un dépôt de brevet dans le cadre de la détection du cancer du poumon ; une démarche de protection intellectuelle favorisée par la SATT¹, qui a investi 320 000 € pour aider à la conduire à maturité.
L’épigénétique suppose la maîtrise de technologies biologiques complexes, la réalisation d’expériences de laboratoire sur plusieurs mois, et l’intégration de techniques informatiques et d’intelligence artificielle. Les équipements et les compétences développées au sein de la plateforme EPIGENExp attirent de nombreuses biotechs en région, en France et à l’international, pour des contrats de recherche partenariale ou des prestations de service.

¹ Société d’accélération du transfert de technologies, la SATT Sayens concerne les territoires de Bourgogne-Franche-Comté, de Lorraine et du Sud Champagne-Ardenne.

Travail d’équipe

La plateforme EPIGENExp est placée sous la responsabilité conjointe d’Éric Hervouet, de Paul Peixoto et de Zohair Selmani, aidés d’Anne Peigney, technicienne de laboratoire. Alexis Overs, médecin au CHU, y prépare actuellement une thèse en bio-informatique, et les étudiants en biologie moléculaire sont régulièrement formés à ses équipements et techniques.

Depuis sa création en 2017, la plateforme EPIGENExp reçoit le soutien financier déterminant de la région Bourgogne – Franche-Comté pour la constitution de son parc machine. Grâce à l’engagement d’Anne Peigney et de Patricia Letondal, EPIGENExp a reçu en 2022 la certification ISO 9001 pour la qualité de ses savoir-faire et de son organisation.

Photo bandeau : Quantification d’ADN par PCR digitale – Photo Ludovic Godard, uFC